A l’occasion du 125e anniversaire de la Bourse des syndicats d’Albi et de la région l’Institut Tarnais d’Histoire Sociale -ITHS CGT- et l’Union Départementale-UD CGT-
ont souhaité mettre en avant le rôle d’utilité sociale ou publique des Bourses du travail qui servent d’appui aux syndicats.
Dans sa préface Laure Malleviale, secrétaire de l’UD, cite Benoît Mounier, Directeur Général d’ICAM France, qui définit l’utilité sociale : « elle se rapporte à un service rendu, à un bénéfice,à un effet positif pour la société dans son ensemble. Elle caractérise les effets d’une action sur un territoire auprès d’un groupe de population ou, plus globalement, de la société ».
Le document « 125 ans de la Bourse du travail d’Albi et de la région » aborde les locaux et les activités des villes du département de Tarn qui ont une histoire importante : la Bourse du travail de Castres et de Graulhet, la Maison du peuple de Mazamet, la chambre syndicale des mineurs de Carmaux. Une maison du peuple accueille les syndicats mais aussi des associations sportives ou culturelles ou des services, à Mazamet une crèche et un gymnase sont intégrés dans la Maison du peuple avec la CGT. La chambre syndicale des mineurs de Carmaux appartient au syndicat des mineurs.
Le rôle premier d’une Bourse du travail est l’organisation du placement des travailleurs par l’intermédiaire de ses bureaux de placement pour femmes et hommes.
Les services des bourses furent marqués par des réalisations considérables, comme les cours d’enseignement professionnel et d’enseignement général, les dispensaires médicaux chargés de lutter lors d’accidents du travail contre les compagnies d’assurances trop complaisantes avec le patronat, et encore les services d’informations juridiques afin de renseigner les travailleurs sur les nouvelles lois à caractère social florissant sous la IIIe République.
De nombreux autres services sont mis en place afin de répondre aux besoins de la population ouvrière tout en assurant son éducation primaire, professionnelle, sociale mais aussi socialiste.
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- Les secours de route, versement d’une allocation appelée viaticum, permettent d’aider les ouvriers de passage en quête d’ouvrage.
- Les bibliothèques, parfois d’une impressionnante composition pour l’époque, comme celle de Paris qui contenait au au tournant du siècle 2700 ouvrages, sont destinées à l’élévation des connaissances ouvrières dans tous les domaines, mais aussi destinées à la distraction.
Les Bourses du travail ont toujours gardé en tête les fameuses formules de Fernand Pelloutier « éduquer pour révolter » et nécessité de donner aux ouvriers « la science de leur malheur ».
La bourse abrite également les locaux de réunions pour les syndicats.
Les Bourses du Travail, en complément aux structures verticales des fédérations de métiers et d’industries, ont apporté une double dimension au syndicalisme français par la constitution d’organismes horizontaux et territoriaux.
Le but principal des bourses en cas de mouvements de grève était, tout en assurant une aide logistique, de diffuser l’information et d’organiser la solidarité à tous les niveaux, auprès de toutes les corporations de la ville :
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Organisation d’une caisse de grève afin de pouvoir soutenir financièrement toutes les corporations engagées dans une lutte
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Envoi de militants sur les lieux du conflit afin de servir de conseillers et d’orateurs étaient aussi des pratiques permanentes des bourses du travail.
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Le premier élément d’importance à noter est la dualité de nature d’une Bourse du travail. Dans une période où il n’existait ni système étatique de placement, ni formation professionnelle réglementée, ni système d’assurance sociale, les Bourses du travail ont alors joué un rôle fondamental en mettant en place des services à
caractères « sociaux » et en répondant de cette manière à des besoins essentiels de la population ouvrière. C’est d’ailleurs à ce titre qu’elles recevaient des subventions de la part de l’État et de municipalités alors dominées par un personnel républicain soucieux de « paix sociale », d’intégration et d’attachement au régime des ouvriers.
Mais les municipalités qui ont aidé à l’installation des bourses du travail avaient les moyens de casser l’action syndicale par une pratique plus sournoise que la répression, en lui diminuant ou même en lui supprimant les moyens de financement. Ce phénomène est à l’origine de la fermeture, de 1905 à 1907, de 16 Bourses du travail dans un contexte où la propagande menée par la C.G.T. autour du premier mai 1906, la revendication pour la journée de huit heures et la grève générale comme moyen d’y parvenir, plaçait la confédération dans une incontestable dynamique révolutionnaire.
Or, de nos jours, les municipalités de « droite », ont laissé dégrader les bâtiments et jugent qu’en l’état les conditions d’hygiène et de sécurité ne permettent pas d’accueillir le public. Ainsi dans le Tarn la municipalité de Saint Sulpice Lapointe s’est retranchée derrière le fait qu’elle n’a aucune obligation de reloger la CGT et a vendu le bâtiment. La municipalité de Castres a mis fin au bail qui la lie à la CGT pour des raisons de sécurité et propose un relogement dans un local de surface insuffisante par location alors qu’actuellement la Bourse est occupée gratuitement.
A ce titre la Bourse du travail d’Albi est exemplaire. Installée Place Lapérouse par le maire Républicain Edouard Andrieu elle a été inaugurée le 24 septembre 1899 par Jean Jaurès. 25 ans plus tard elle a été frappée d’alignement et le maire, qui était toujours Edouard Andrieu, a relogé la Bourse à son adresse actuelle Place Fernand Pelloutier. Elle a été rénovée à la libération par la municipalité. Dans les années 1990 le bâtiment était très dégradé et le bâtiment à été remis au Conseil Général pour 0,15€ symbolique ; en contrepartie le département a effectué 450 000€ de travaux et la CGT a bénéficié d’un bail emphytéotique de 99 ans. Pour pérenniser l’occupation du bâtiment l’UD envisage de faire classer le bâtiment comme patrimoine ouvrier et historique.